Les 4960 visages de Sophie Guillemin

A l’occasion de la parution du livre pêle-mêle L’embrouillamini, le générateur de visages, Breadcrumb pose 5 questions à Sophie Guillemin, illustratrice et animatrice d’arts plastiques autour du livre avec les enfants

5 questions à Sophie Guillemin

B. Vous êtes une grande admiratrice d’Anouk Ricard, et animatrice d’ateliers d’arts plastiques, pourriez-vous nous parler de votre dernier ouvrage, L’Embrouillamini, le générateur de visages ? Pour ma part, j’ai pensé aux mascarons, ces visages grimaçants de pierre au dessus des portes de beaux immeubles…

 

S. Anouk Ricard ou même aujourd’hui Emilie Gleason (à découvrir absolument!) sont de vraies inspirations. Chaque dessin est un condensé d’humour. Ces auteures synthétisent tout ce que j’ai envie de lire et que j’ai envie de transmettre. Un dessin efficace, spontané et coloré, et surtout beaucoup d’éclats de rire. C’est vraiment inspirant.
L’envie d’un dessin qui se renouvelle, étonne et avec lequel on peut jouer a été la base de nombreux ateliers avec les enfants. Je privilégie le plaisir du dessin avant tout. Je pars de l’idée que si l’enfant prend plaisir à faire, alors il voudra continuer. C’est un formidable outil d’expression!
J’ai en tête un élève de moyenne section qui partait dans des colères noires dès qu’il pensait rater. Une feuille blanche pour lui, c’était un calvaire. Après plusieurs semaines, il a repris goût au dessin. Un jour, à la fin d’un atelier, il a regardé son dessin et a dit : « ah c’est un peu raté quand même, mais c’est rigolo ! ». Un gros dinosaure rouge, avec des airs de chien enragé. Enfin ! Il ne se souciait plus de réussir du premier coup, ce qui n’a pas de sens en dessin, mais plutôt du plaisir de faire. Avec ce que la surprise d’un trait non maîtrisé peut faire apparaître.

Mascaron à Troyes

L’Embrouillamini est un livre-objet que j’avais en tête depuis longtemps. Pour mes ateliers, je m’appuie souvent de l’ouvrage  Le fabuleux bestiaire du professeur Revillod, un livre pêle-mêle avec texte qui permet de mélanger le corps d’une puce avec le devant d’un éléphant, le tout avec un dessin encyclopédique. Il est redoutable de génie. Le livre pêle-mêle est un objet souvent repris par les illustrateurs, j’ai choisi moi aussi d’en faire un. En plus avec des spirales, j’avoue bien aimer ce moyen de reliure !

B. Les bibliothèques s’intéressent depuis plusieurs années aux jeux. Le calcul de combinaisons possibles pourrait être utile dans le cadre d’une création d’animation d’escape game. Comment avez-vous fait pour obtenir le nombre de visages total ?

S. Les Escape games sont pas mal en vogue. Je comprends l’engouement, le travail d’équipe et l’intérêt autour du mystère à résoudre. Mais l’idée d’être enfermée ne me convient pas. Le dehors guérit. J’ai de plus en plus envie d’y être et d’y rester. Et ça ressort dans mes dessins. Peu d’intérieurs et jusque là peu de paysages, mais aujourd’hui l’envie d’extérieur est plus forte. Alors apparaissent depuis quelque temps déjà dans mes dessins des arbres, des végétaux florissants, des potagers joyeux.

Concernant le calcul pour l’Embrouillamini j’ai utilisé une formule que l’on retrouve sur Internet, j’ai juste eu à rentrer le nombre de visages  : 32 et le nombre de variations : 3, appelés p et n dans le site dcode.fr. Je n’ai pas les connaissances mathématiques qui me permettent de calculer sans l’aide d’algorithme 😉

 

(c)Sophie Guillemin

 

B. Vous avez été retenue comme l’une des 5 illustrateurs et illustratrices d’un jeu d’apprentissage concernant le FLE (français langue étrangère), Pourriez-vous nous en faire un « pitch » ?

 

S. Le jeu Dimoa est un jeu d’apprentissage de la langue française sous forme d’imagier. Il a été conçu par Sidonie Milon. Au début le projet était de rafraichir la bibliothèque d’images d’une association d’aide aux devoirs strasbourgeoise, Sidonie m’avait alors proposé d’illustrer leur nouvel imagier. Mais la tâche s’est avérée un peu plus conséquente que nous ne l’imaginions. Il y avait un peu plus de 950 mots à illustrer, le tout bénévolement. Avoir du renfort s’est révélé nécessaire. Chemin faisant, Sidonie s’est attelée à concevoir un jeu entièrement, avec son code graphique. Il a été testé par des classes d’UPE2A. Actuellement, le projet est en attente de subventions supplémentaires pour être édité, bien qu’il ait reçu deux prix. La crise sanitaire étant en partie la cause de l’arrêt du projet.

 

B. Vous animiez un ancien site d’ateliers pour enfants, l’atelier qui dessine ? 

 

S. Toujours dans l’envie d’allier plaisir de faire et pratique du dessin, l’atelier qui dessine était un site pour compiler les idées d’ateliers pour enfants que nous avions avec Elizabeth Holleville, intervenante en ateliers bande dessinée et auteure. Quand on est artiste, illustrateur, auteur, on multiplie les casquettes. On n’est pas simplement sur notre table de travail, on dessine. Pour pallier parfois la précarité de la profession, on est amenés à multiplier les occasions de revenus, par exemple avec des ateliers périscolaires. On est toujours à la recherche d’échanges, de projets en partenariat avec des écoles, des musées, des associations (Les bateliers par exemple à Strasbourg, où j’interviens quelques fois, ou encore l’association Arachnima). La communauté artistique est grande à Strasbourg et solidaire. On se file des idées, des plans, des contacts. C’est un joyeux bouillon. Le site de l’atelier qui dessine n’est plus alimenté aujourd’hui car nos activités changent, et les occasions de travailler ensemble ne se font parfois plus. De mon côté, je suis toujours ouverte aux propositions d’interventions car cela me donne l’occasion de me renouveler. De faire des recherches, et de créer de nouveaux ateliers. C’est un bon moyen d’inspiration et surtout un beau moment de partage.

 

B. Vous vivez à Strasbourg, ville phare pour l’illustration. De nombreuses initiatives y sont menées grâce à nombre d’institutions importantes : le Musée Tomi Ungerer, le Centre de l’illustration, l’Ecole Supérieure des Arts Décoratifs de Strasbourg (HEAR) et pas loin, le festival jeunesse de Schilick-on-Carnet. Souhaitez-vous nous en dire quelques mots ?

 

S. Strasbourg regroupe pas mal d’artistes-auteurs. Aujourd’hui j’y suis depuis 7 ans, et j’ai l’impression que cette ville peut encore proposer beaucoup de choses autour de l’illustration et de la création. Il y a par exemple la formidable association Central Vapeur qui conseille et aide les artistes-auteur dans le calcul de leur devis et l’approche des contrats. Ils ont édité deux revues : la facturation pour les pros et négocier pour les nuls qui sont de bon conseil quand on se lance dans cette activité. Et pas que ! Il y a aussi le festival Central vapeur et les rencontres de l’illustration en mars, et l’événement du battlestar, qui mélange cinéma et illustration ! À vivre au moins une fois dans sa vie, on en sort lessivé comme à une séance de sport. Le musée Tomi Ungerer c’est un incontournable de Strasbourg, bien que le musée alsacien soit aussi un vrai lieu de curiosité strasbourgeoise, tant par son architecture que par ses collections. Et puis il y a deux lieux qui me sont chers : L’Atelier du bain aux plantes, dans le quartier de la petite France, lieu d’expositions et atelier dont j’ai fait partie pendant un an, un vrai lieu de bienveillance et d’entraide artistique. Et il y a la boutique de créateurs le Générateur, rue Sainte-Madeleine, on y retrouve des illustrateurs, céramistes, bijoutiers, du savon, des infusions, bref du local et du joli ! J’ai eu l’occasion de faire partie de leur boutique éphémère l’Ecrin 3 années de suite à l’occasion du marché de Noël de la ville, et d’y vendre mes illustrations et objets curieux faits main.

 

B. Quels sont vos projets pour le futur ?

 

S. Ce sont des projets plus personnels à court terme. Je pars pour le Finistère avec mon compagnon. Après l’Alsace, on a décidé d’aller explorer le bord de mer. Les derniers mois en ville et les évènements récents nous ont décidés à prendre le large. Mais j’ai toujours des projets dans ma besace, je réfléchis à des projets auto-édités, des cherche et trouve, des livres de coloriage, en petite édition que j’aurai l’occasion de vendre sur des marchés ou des salons ou sur ma boutique etsy. Mais, à plus long terme, j’espère que mes projets d’histoires trouveront un éditeur, un jour.

 

Merci Sophie et bonne installation chez les Bretons !

L’Embrouillamini
Le générateur de visages
Titre du Livre : L’Embrouillamini
Format : 16×20,5 cm
Nombre de pages : 34 pages
Prix unitaire TTC : 22,50
Reliure spirale sur papier Nature Weiss 250 grammes,
imprimé au Boulevard à Strasbourg en 100 exemplaires
Amusez-vous au gré des pages à façonner 32 visages existants,
enigmatiques, drôles, terrifiants en les combinant et ainsi créer 4960
personnages différents !
Livre objet sur le principe du pêle-mêle auto-édité en 2021

Contacter Sophie Guillemin

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